Tout a changé quand Eddy Jaquet a fait savoir à MB&F qu’il aimerait en faire plus. La conversation initiale a engendré une séance de brainstorming qui a abouti à la création d'une série de huit pièces uniques illustrant des romans ou nouvelles de l’auteur français du XIXe siècle Jules Verne. La montre choisie, la Legacy Machine Split Escapement, était celle qui offrait le plus d’espace pour la gravure des représentations de ses œuvres.
Au cours de ses recherches préliminaires, Eddy Jaquet a dévoré près de 60 romans et nouvelles de Jules Verne avant de sélectionner les œuvres, certaines des plus appréciées comme Vingt mille lieues sous les mers, d’autres moins connues comme les Aventures du capitaine Hatteras. Les huit pièces LM Split Escapement Eddy Jaquet se sont arrachées en un rien de temps et l’édition Le Tour du monde en 80 jours a remporté le prix Métiers d’art du GPHG en 2021. Lorsque la dernière pièce de la série a été livrée à son propriétaire, en 2022, la question « Et après ? » s’est naturellement posée.
HUIT NOUVELLES CRÉATIONS INSPIRÉES PAR LA LITTÉRATURE
MB&F a décidé de créer une deuxième série inspirée par la littérature et présenté à Eddy une liste de 15 célèbres romans de la catégorie jeunesse, en lui demandant d’en choisir 8. Il a relu toutes les histoires au cours des semaines et des mois qui ont suivi, avant de faire la sélection suivante :
Robinson Crusoé de Daniel Defoe
Les Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas
Le dernier des Mohicans de James Fenimore Cooper
Le Livre de la jungle de Rudyard Kipling
L'appel de la forêt de Jack London
Moby Dick de Herman Melville
L'île au trésor de Robert Louis Stevenson
Robin des Bois (anonyme)
Comme dans la série Jules Verne, aucune des illustrations ne provient d’une œuvre artistique existante. Eddy Jaquet les a complètement conçues, après avoir lu les livres de référence et consulté d’autres œuvres, des films et des bandes dessinées notamment.

Chaque gravure constitue un tableau complexe de scènes et moments clés, une synthèse née de l’imagination d’Eddy Jaquet et expressément conçue pour figurer sur le moteur de la LM SE. Hormis la liste des 15 romans à prendre en considération, MB&F a laissé le graveur totalement maître de son processus de création.
Eddy Jaquet a dû non seulement exercer sa créativité et son talent de graveur au plus haut point, mais également pratiquer son art avec les exigences et les limites imposées par le moteur de la LM SE. Le cadran dédié à la gravure, en réalité la platine du mouvement, présente une surface plate mais une épaisseur variable, en fonction des divers composants du mouvement fixés au verso. Il n’était pas possible de graver la platine-cadran comme si l’épaisseur était partout la même : il a fallu repérer avec précision les zones les plus fines pour éviter de percer le support par inadvertance, là où la gravure devait être effectuée en profondeur.

Côté production, on a apporté plusieurs modifications à la LM Split Escapement afin de maximiser l’espace disponible pour la gravure et de permettre à Eddy Jaquet d’exposer pleinement son savoir-faire. Les sous-cadrans de la date et de la réserve de marche ont été ajourés, la platine-cadran élargie. On a dessiné une lunette plus fine et adapté la taille du boîtier à la nouvelle platine-cadran. Comme les dimensions des lunette et boîtier ont changé, il a fallu produire un nouveau dôme en verre avec, compte tenu du plus grand diamètre, une incurvation moins prononcée.
Les montres en acier de cette deuxième série Eddy Jaquet présentent des sous-cadrans noirs au-dessus des plaques en or blanc ornées des gravures complexes qui donnent vie aux trésors de la littérature classique. En outre, chaque pièce est accompagnée d’un dessin original, signé Eddy Jaquet, et d’une Loupe System X6 pour permettre au propriétaire d'accéder à un tout nouveau niveau de découverte.
À PROPOS DES GRAVURES
Pour les pièces uniques, Eddy Jaquet a choisi des romans qui lui rappellent des souvenirs d'enfance. Après les avoir redécouverts, il a dessiné des croquis originaux sur des modèles de platine-cadran, chacun racontant une histoire issue d'un chapitre entier ou d'un seul paragraphe. Pour Le Livre de la jungle, Eddy Jaquet a créé une scène qui réunit l’ensemble des personnages principaux : Mowgli est recroquevillé entre les pattes de Rama et, autour, Raksha, Bagheera, Baloo et Shere Khan montent la garde. Pour L'île au trésor, il n’a retenu que deux phrases du roman et on voit Jim qui a sauté du bateau pour échapper aux pirates.
Même si l'œuvre finale se limite à environ 40 mm de diamètre, le sujet est extrêmement détaillé. Le graveur a créé chaque image exactement comme un peintre représenterait une scène sur une grande toile, à la seule différence qu’il a utilisé un burin à la place d’un pinceau.

Pour cette série, Eddy Jaquet a choisi une approche un peu différente de celle des éditions Jules Verne, en mettant les héros des romans au centre des illustrations. Les personnages sont souvent représentés assis ou agenouillés au premier plan, à six heures sur le cadran, avec de l’espace pour le développement de la scène au-dessus d'eux. Certains personnages sont si petits qu’Eddy Jaquet a dû intégrer un maximum de détails pour les rendre vivants. La scène des Trois Mousquetaires représente dix jeunes gens engagés dans une bataille à l'épée, dont deux minuscules personnages particulièrement détaillés sur le balcon. Il en va de même pour les trois petits personnages assis autour d'un feu de camp qui illustrent Le dernier des Mohicans.
Les détails imperceptibles à l'œil nu se révèlent au spectateur sous une loupe, ce qui engendre un tout autre niveau d'appréciation. Ainsi, le propriétaire de la pièce Robinson Crusoé découvrira, sur une croix de bois, un décompte des jours impossible à percevoir sans grossissement. Chaque montre est accompagnée du dessin original de l'artiste afin que le propriétaire puisse réaliser combien il est difficile de passer d’une œuvre en deux dimensions sur une grande feuille de papier à une œuvre en trois dimensions sur le cadran d'une montre.
Eddy Jaquet se distingue en outre par sa façon de traiter le métal, afin de créer un maximum de contrastes. Même en travaillant les outils à sa manière, il crée une différence dans la couleur et le jeu de lumière qui apportent de la texture aux tableaux. La conjugaison de surfaces mates et polies vient renforcer l’effet. De plus, la scène se modifie en fonction de l’orientation de la montre, car la lumière éclaire les surfaces méticuleusement travaillées différemment. On peut alors mieux apprécier la maîtrise d’Eddy Jaquet en matière de gravure.

Cependant, toutes les prouesses ne sont pas perceptibles. À certains endroits, la platine-cadran atteignait 1,15 mm d’épaisseur, ce qui laissait à Eddy Jaquet suffisamment de matière pour graver en profondeur. Dans trois zones particulièrement vulnérables, où il ne disposait que de 0,35 mm d’épaisseur, il a dû travailler avec une extrême prudence tout en s’assurant que l’esthétique générale de la gravure, très détaillée, ne soit pas compromise.
Il a également dû bien réfléchir à la composition de chaque scène, afin que les parties cachées par différents composants de la montre, comme les sous-cadrans, les ponts et le spiral, ne nuisent pas à la compréhension du sujet. Dans certains cas, les restrictions ont permis d’enrichir la scène. Dans la pièce Robinson Crusoé, où le personnage principal et son compagnon Vendredi observent un navire en mer, l'un des sous-cadrans sert de cadre à sa vue à travers un télescope.
On peut apprécier la deuxième série LM Split Escapement Eddy Jaquet à de multiples niveaux. De loin, à travers une salle bondée, on admirera la silhouette et le design singulier des montres. Au poignet, on percevra les différentes scènes dans leurs grandes lignes. Mais ce n'est qu’en découvrant les détails à travers une loupe que la magie commencera vraiment à opérer. Quand on y pense, c'est un peu comme la découverte des romans eux-mêmes. Elle commence par la couverture du livre, se poursuit par le résumé au dos et se termine par la plongée dans les pages de l'histoire.